lundi 20 mai 2013

«Parlez-vous keuf ?»: publication d’un dictionnaire du jargon policier

Voici un article qui a été publié par le journal Libération sur son site internet.


Si vous avez l’habitude de ralentir sur l’autoroute pour regarder un accident, ne vous étonnez pas si un CRS vous traite tout haut de «cref» en riant sous casque. Pour savoir ce qu’il a bien voulu signifier, vous disposez désormais d’un abécédaire publié mercredi par le capitaine de police Gilles Braun, 51 ans: le CRS vous a traité de «con qui regarde en face». Un «sigle utilisé», selon l’auteur, «pour désigner» un automobiliste qui, afin de satisfaire sa curiosité, a l’habitude de «créer des bouchons inutiles voire un sur-accident» en regardant l’événement «survenu en sens inverse». Intitulé «Parlez-vous keuf ?» (Editions Vuibert) - apocope, comme il est expliqué à la lettre K, du verlan des banlieues «quefli» pour flic - le livre regorge, sur plus de 200 pages, d’expressions et acronymes ou sigles couramment utilisés par les forces de l’ordre. «Je me suis lancé dans ce travail il y a trois ans», explique ce policier passé par la PJ, la formation et l’international. «C’est parti du constat de collègues partant en stage à l’étranger qui étaient démunis face au parler de leurs collègues, eux-mêmes étant incapables de leur expliquer le leur.» Il a donc fait appel à sa mémoire afin de rassembler des mots que ne renieraient pas Michel Audiard, San-Antonio et auteurs de polars. A la lettre U, «faire les urines» consiste à «effectuer des recherches sur les antécédents judiciaires» d’un suspect. «Si les urines sont claires, c’est que l’intéressé est inconnu des services». L’auteur cite souvent des choses entendues dans les commissariats. Ici : «On le ramène au poste et on vérifie les urines.» «Beurrer le marmot» c’est corriger un individu pour obtenir des aveux «de manières peu orthodoxes», une méthode d’avant l’ADN, tient-il à préciser. Exemple: «Comme on n’a pas toujours avancé depuis ce matin je vais certainement beurrer le marmot.» «Picard»: un SDF Une «amazone» est une prostituée qui «attend le chaland à bord de son véhicule». Voir aussi, dit l’abcédaire qui renvoie souvent à d’autres expressions, «aller aux asperges» (sur le lieu de travail de la prostituée), «chandelle» (être sur un haut tabouret pour appâter le client), «gagneuse», «marmite», «michetonneuse», «tapineuse». Une «angine de comptoir» ? Une personne «sortant d’un bar en état d’ivresse». Un «Picard» ? Surnom donné à un SDF «retrouvé décédé dans la rue en hiver». «Avoiner» est «corriger une personne», dans le cas d’un différend.

Voir aussi, est-il écrit, «mettre une trempe», «bomber la guérite», «chicorer» ou «chiffonner». Un «bol alimentaire» désigne l’estomac dans le cadre d’une autopsie, le «mur des lamentations» le fastidieux tableau des permanences judiciaires dans les services de police et de gendarmerie. «Aller aux morilles», c’est se rendre au service des objets trouvés pour y apporter son écot. «Aller à la poule» déposer plainte au «poulailler», le commissariat «essentiellement fréquenté par des poulets», écrit Braun, «sobriquet de basse-cour employé pour désigner un policier». Darry Cowl était le surnom d’un ministre de l’Intérieur des années
1980, Pierre Joxe; un «saucisson» est une affaire «sans intérêt» désignant aussi une personne ficelée lors d’une agression. Le «cul-de-jatte» est ce policier qui ne fait que des procédures, ne sortant jamais de son commissariat. «Aller aux éponges» veut dire passer une visite médicale des poumons, tous les six mois pour certains agents parisiens. «Le policier, cogne, condé, flic, keuf, schmitt, bourre, lardu, poulet, dispose d’une assez large gamme de dénominations qui ont passé les siècles en se modernisant», théorise, dans la préface de l’ouvrage, le criminologue Alain Bauer. «Il était utile» de disposer «d’une pierre de Rosette du policier en action» afin de «comprendre les messages codés et les acronymes inventés par d’audacieux bureaucrates», ajoute-t-il.

- Bon il est vrai que l'article s'adresse plutôt aux Français, mais il faut bien se cultiver un peu!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire