Lors de ses conférences sur la communication et la prévention de conflits en milieu de travail, la psychologue Éveline Marcil-Denault dénote des contradictions dans l'utilisation des courriels. «Les gens sont sensibles à ce qu'on leur écrit, mais ils sont souvent moins conscients de la teneur de leurs propres messages. Par exemple, quand un patron reçoit 200 courriels par jour et qu'il répond de façon succincte, ses messages peuvent être déstabilisants. Des employés anxieux peuvent interpréter le délai de réponse ou la teneur des mots comme un désaveu ou une critique injustifiée. L'ambiguïté d'un courriel peut provoquer beaucoup d'inquiétude, d'incompréhension ou de colère. C'est important d'apprendre à connaître nos interlocuteurs. Plusieurs entreprises ont d'ailleurs établi des ententes de communications pour clarifier les règles du jeu sur le délai de réponse, l'utilisation des courriels et le ton des messages.»
Le courriel s'impose par sa rapidité, sa gratuité et sa capacité à abolir les distances. Cette impression pousse de nombreux travailleurs à écrire avec un style relâché, qui nuit à leur image et à celle de leur employeur.
On n'écrit pas comme on parle
Selon Marie-Éva de Villers, directrice de la qualité de la communication à HEC Montréal, les internautes font souvent l'erreur d'appliquer les règles de la communication orale à leurs courriels. «On écrit un peu n'importe comment en se disant que ça ne compte pas, comme avec les textos. Ce n'est pas tant par manque de considération pour ceux à qui on écrit, mais plutôt par nonchalance. Puisqu'on ne voit pas nos interlocuteurs, il faut éviter de recourir aux majuscules intempestives, au caractère gras, au rouge ou aux points d'exclamation, dont les effets abrupts ne conviennent pas aux situations de communication professionnelle.»
L'ordinateur dépersonnalise souvent la communication. Les usagers doivent privilégier les phrases positives et les formules de politesse afin d'humaniser leurs courriels. Ils doivent aussi éviter le second degré qui risque d'être mal interprété à l'écrit. «Dans un contexte où on communique avec des gens qu'on connaît bien ou à des collègues, on peut se permettre d'utiliser les binettes (smileys) pour atténuer notre propos. Mais c'est à éviter absolument avec la direction ou un client, précise Mme de Villers. Même chose avec les salutations et les expressions trop familières. Si on les utilise, c'est un peu comme si on tutoyait quelqu'un qu'on ne connaît pas. Au travail, il faut éviter tout ce qu'on n'écrirait pas dans une lettre officielle.»
Maladresses
L'image est tirée du site www.ya-graphic.com |
Même si les qualités professionnelles d'un travailleur ne se résument pas à son utilisation du français, les maladresses de la langue peuvent lui nuire considérablement. «La syntaxe rudimentaire, les phrases trop courtes, les coquilles, les répétitions, les mots omis, les fautes d'orthographe, les abréviations et le vocabulaire limité peuvent être très dommageables», explique Marie-Éva de Villers, qui est l'auteure du Multidictionnaire de la langue française.
La psychologue Éveline Marcil-Denault croit qu'il s'agit ici de l'effet de halo. «Les gens qui valorisent la communication écrite vont porter un jugement défavorable sur l'auteur d'un courriel dont la forme est déficiente. Ils peuvent croire que leur interlocuteur ne se relit pas ou qu'il manque de culture, et se dire que le produit ou le service de l'organisation ne sera pas à la hauteur. Tous les aspects de la communication et de l'image ont un impact à différents degrés.»
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